« Le tango est une pensée triste qui se danse »

 

La première fois que l’on entend ou que l’on lit cette phrase, l’image marque en général par sa pertinence, par sa poésie, par sa justesse. Quelques années après, cette phrase explique et éclaire chez les danseurs ce sentiment fou et pourtant évident que le tango argentin ne s’enseigne pas, mais qu’il s’acquiert et se transmet, de danseur à danseur, à la vitesse de chacun, selon son expérience et son vécu, selon le temps et l’énergie consacrés, selon les rencontres et les échanges survenus.

Un certain nombre de figures existent, qui définissent une partie du vocabulaire, et qui permettent de développer sa danse plus avant. Une grammaire peut également se décrire, à commencer par la règle de l’improvisation, et elle permet d’avancer sur le chemin de la découverte du tango et de le partager avec le monde entier. Mais aucun de ces points ne peut être ordonné d’une seule façon pour définir un enseignement unique. Et seuls ou réunis, ces points demeurent souvent insuffisants pour danser le tango

Maître de presque rien, élève de plusieurs

Il apparaît ainsi que chaque danseur est en apprentissage permanent, maître de presque rien et élève de plusieurs. En l’espace de quelques heures seulement, il passe du statut de débutant à celui de danseur comme les autres, embarqué sur une route personnelle et singulière qui se reflètera dans sa danse. Il peut modestement parler de ce qu’il a découvert et compris pour lui-même. Il voit humblement et constamment ses limites, ses faiblesses et ses imperfections.

Il n’y a donc pas de professeur de tango argentin ni d’école de tango argentin, mais uniquement des « passeurs de tango » ! Dans les pratiques, dirigées ou non, lieux majeurs de transmission, les hommes et les femmes se parlent et apprennent. Dans les milongas et les bals, les femmes découvrent dans les bras de danseurs plus confirmés, les hommes ne conservent que ce qu’ils dominent suffisamment et apprivoisent l’environnement du bal. Dans les ateliers et les stages enfin, quand ils existent, des danseurs partagent ce qu’ils ont lentement recueilli, et toute déclaration de vérité ou de doctrine ne peut être que suspecte.

Pas une danse, mais une culture

Un facteur essentiel à l’apprentissage du tango argentin est la prise de conscience que ce n’est pas une danse, mais une culture, pas une technique, mais un mode d’expression. La démarche est plus introvertie qu’extravertie. La danse est moins un divertissement qu’une rencontre avec l’autre et avec soi-même. Quelque soit l’endroit, l’âge ou le moment, tout le monde peut avoir quelque chose à dire, tout le monde a quelque chose à apprendre, humblement.

Depuis ses origines, Tango de Soie s’interroge régulièrement sur la transmission de la danse et revient toujours à cette ligne générale, conservant en conséquence au coeur de ses propositions les pratiques, les milongas, les ateliers et les stages.